Florence Baie
La mécanique des mots
Dans ma vision, être biographe, c’est être un peu mécanicien. Professionnel de l’écrit nous sommes, c’est-à-dire de la mécanique invisible de l’écriture qui fait qu’un texte « roule »…
Si les livres que nous écrivons sont le plus souvent réalisés à partir d’entretiens entre nous et un narrateur, il n’est pas rare aussi que l’on nous confie un manuscrit que l’on croit achevé « pour avis ».
Car aussi beau et aussi abouti soit-il, pour qu’un texte décolle, le coup de pouce de quelqu’un du métier peut parfois être nécessaire. L’histoire, évidemment, c’est la vôtre. Ce sont vos mots, vos formules, votre vision particulière de la vie et des événements. Cela, on pourrait presque dire que c’est la carrosserie. Mais tout comme un bon mécanicien peut souvent savoir à l’oreille pourquoi un moteur ne tourne pas rond, c’est pareil dans notre métier d’écriture. L’écrou de la concordance des temps gagnerait-il à être resserré, voire à être revu entièrement ? À moins qu’une goutte d’huile, peut-être, dans l’articulation de certains passages…
Être biographe, c’est donc souvent avoir les mains dans le cambouis. Dans le cambouis des histoires que l’on nous confie, avec pour mission, justement, de rendre la mécanique invisible. Car quoi de plus beau, quand on ouvre un livre, que de sentir le texte prendre de lui-même son envol ? Toutes ses plumes ont été lissées, parfaitement ordonnées… On avait devant soi une mécanique, et voilà que c’est un bel oiseau ! Être biographe, je vous le dis, c’est franchement parfois être magicien !
Photo : (c) Pixabay