Vanessa Springora : en quête du nom

Le récit que Vanessa Springora vient de faire paraître chez Grasset est une enquête sur sa lignée paternelle. Elle y explore la puissance du nom de famille et les effets des secrets familiaux sur plusieurs générations.

En janvier 2020, alors que Vanessa Springora est attendue sur le plateau de La Grande Librairie pour parler de son livre, Le Consentement, l’autrice reçoit un appel de la police pour venir reconnaître le corps sans vie de son père, qu’elle n’a pas revu depuis dix ans. Un père absent, mythomane, qui ne lui laisse que « le souvenir brûlant de son énigme ».

En vidant l’appartement de son père, elle découvre des photos de Joseph, son grand-père paternel, déserteur de la Wehrmacht, une figure familiale présentée comme un héros de guerre. Sur ces clichés, Vanessa Springora s’aperçoit avec effroi qu’il arbore les insignes nazis.

Fictions familiales

Qui était au juste ce grand-père aimant et aimé, doté d’un fort accent qu’elle croyait tchèque ? A-t-il participé à la barbarie nazie ? D’où vient ce nom de famille un peu bizarre dont elle a hérité ? Un nom dont son père lui avait soufflé « qu’il n’était pas celui que nous croyions, qu’il en cachait un autre, gardé secret pour des raisons troubles et par conséquent dangereuses. »

Vanessa Springora se lance sur les traces de Joseph et de son nom, un nom d’emprunt dissimulant un secret de famille pesant. L’histoire familiale et l’Histoire se mêlent, propulsent le lecteur en Europe centrale avant et pendant la Seconde Guerre mondiale, en Tchécoslovaquie, dans la communauté sudète à laquelle appartenait Joseph.

Vanessa Springora tente de reconstruire cette lignée paternelle faite de silences et de fictions (que l’écrivaine préfère à « mensonges »). Ce faisant, elle met en lumière combien les légendes familiales sont modelées par le temps, la mémoire et le récit qu’on en fait. Patronyme est aussi une réflexion sur l’un des piliers de la transmission, le nom de famille, et sur les effets des non-dits et des secrets de famille.